Une matinée au MBAM – mai 2015

Accompagnement musical

Autre décor, autre atmosphère. Il n’est pas nécessaire d’aller au bout du monde pour être dépaysé. Prendre sa voiture, faire 90 minutes de route, aller quérir son amie Linda et se rendre en plein centre-ville de Montréal pour passer une matinée ensemble dans un musée, c’est aussi stimulant, agréable et gratifiant que de se rendre à Tombouctou. Car allez visiter une exposition sur l’orientalisme ouvre la porte sur l’ailleurs, soumet nos yeux à un ravissement pictural et interpelle nos oreilles à un dépaysement musical. Qui pense Maghreb ou à toutes autres contrées arabes ne peut demeurer insensible à la musique Berbère. Je vous la propose donc pour accompagner la lecture de la présente page.

Merveilles et mirages de l’orientalisme – De l’Espagne au Maroc, au MBAM

Petite intro sur l’exposition du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM). L'orientalisme est un courant artistique et littéraire occidental du XIX^e siècle. Il marque l'intérêt de cette époque pour les cultures du Maghreb, turque et arabe ou, de façon plus large, sur toutes les régions dominées par l’Empire Ottoman. L'intérêt de l'occident pour l'orientalisme est apparu au courant du XVIII^e siècle mais c'est surtout au XIX^e siècle que l'attrait pour les thèmes orientaux va connaître son apogée. La grande majorité des peintres orientalistes ont tirés leur inspiration de leurs voyages et rassemble des artistes aux œuvres et aux personnalités aussi différentes et opposées que Horace Vernet, Ingres, Delacroix, Théodore Chassériau, Jean-Joseph Constant, dit Benjamin-Constant (principal artiste exposé dans le cadre de l’exposition du MBAM), Jean-Léon Gérôme, Fromentin, Alexandre Roubtzoff, jusqu'à Renoir (avec son Odalisque de 1884) ou même Matisse et Picasso au tout début du XX^e siècle. C'est donc un thème assez vaste qui parcourt les différents mouvements picturaux de cette période. D'un point de vue technique, la peinture orientaliste est marquée par une utilisation de couleurs aux tons plus chauds, privilégiant des teintes plus rouges, jaunes ou brunes. La lumière est chaude, les contrastes accentués. Et un choix de sujets qui se réfère à une thématique orientale.

Ma visite à Montréal n’était pas motivée uniquement par le plaisir de passer du bon temps avec mon amie Linda, mais aussi par le luxe de prendre le temps pour faire un tour élargi de l’ensemble du MBAM et tout particulièrement pour voir les nouvelles salles (du moins pour moi) consacrées à l’art québécois et canadien.

Vous avez le goût pour une petite virée dans l’exotisme orientalisant et en prime une visite rapide du Musée des beaux-arts de Montréal avec l’« œil » et les impressions de CamiloMondo  ! Eh bien ! suivez-nous…

Tête de Maure (vers 1875)
Benjamin-Constant (Paris 1845 – † Paris 1902)
Comment ne pas aimer.

Les derniers rebelles, scène d'histoire marocaine (1880)
Benjamin-Constant
La pose du gisant à droite est caractéristique chez Benjamin-Constant
(vous verrez bien un peu plus bas)

Le lendemain d'une vistoire à l'Alhambra (1882)
Benjamin-Constant
Chair fraîche comme exutoire.

Le lendemain d'une vistoire à l'Alhambra – détail (1882)
Benjamin-Constant
Un vainqueur davantage apathique que conquérant.

Chef bédouin (1872)
Aquarelle sur traits à la mine de plomb
Marià Fortuny i Marsal, dit à l'époque Mariano Fortuny (Reus [Catalogne] 1838 – † Rome 1874)
Il y a toujours un lien avec ma Sérénissime... 
car ce peintre est le père de Mariano Fortuny y Madrazo (Grenade 1871 – † Venise 1949) – célèbre couturier et créateur de textile – qui fit fortune à Venise.
Une des œuvres que j’ai le plus appréciée de l’exposition.

Le Massacre des Abencérages (vers 1870)

Mariano Fortuny

On sent déjà la palette des couleurs des tissus du fils !?!

Le Massacre des Abencérages – détail 1 (vers 1870)
Mariano Fortuny
Un tantinet impressionniste ?

Le Massacre des Abencérages – détail 2 (vers 1870)
Mariano Fortuny
Autre gisant (à gauche), même pose.

Saint-Jean Chrysostome et l'impératrice Eudoxie – détail 1 (1893)
Jean-Paul Laurens (Fourquevaux 1838 – † Paris 1921)
Est-il en train d'haranguer ou d'implorer l'impératrice ?...

Saint-Jean Chrysostome et l'impératrice Eudoxie – détail 2 (1893)
Jean-Paul Laurens
Est-elle stoïque ou agnostique ?...

Saint-Jean Chrysostome et l'impératrice Eudoxie (1893)
Jean-Paul Laurens
... ou bien est-ce plutôt un dialogue de sourds ?

Au bazar (?)
Benjamin-Constant
J'adore surtout la brillance des couleurs.

Le marchand de babouches (1872)
José Villegas Cordero (Séville 1844 – † Madrid 1921)
Nous ne sommes pas à une savate près.

Hassan et Namouna (1870)

Crayon, aquarelle et rehauts de gouache sur papier

Henri Regnault (Paris 1843 – † Rueil-Malmaison 1871)

Pour la richesse des tapis et des étoffes et l’indolence après le « transport » extatique.

Une autre de mes œuvres préférées de l’exposition.

Arabe assis (?)
S.d.
Nu masculin aux tons ocrés et safranés, un classicisme « orientalisé ».

L'étal du boucher (1870)
Benjamin-Constant
Le contraste des couleurs entre la pudeur (d’un bleu virginal) et l’étalage des chairs (d’un rouge sanguin).

Présent d'un pacha (avant 1883)
Benjamin-Constant
Toujours une touche de vert (très beau d’ailleurs)…
Michel Pastoureau y reconnaîtrait bien LA couleur de l’Islam.

La Boutique du tailleur (1878)
Benjamin-Constant
Les petites mains sont masculines dans la confection maghrébine.

Les soldats du pacha – détail 1 (vers 1880)

Benjamin-Constant

Les soldats du pacha – détail 2 (vers 1880)

Benjamin-Constant

Bain turc, dit aussi Bain maure (1870)
Jean-Léon Gérôme (Vesoul 1824 – † Paris 1904)
J’aime beaucoup la chaleur, la richesse et le contraste des tons de ce tableau.

Le roi du Maroc allant recevoir officiellement un ambassadeur européen (vers 1885)
Benjamin-Constant
Un décorum en proportion égal à celui de Venise.

Prisonniers marocains (1875)
Benjamin-Constant
L’ensemble est très beau, mais j’ai davantage été attiré par les détails…

Prisonniers marocains – détail 1 (1875)

Benjamin-Constant

Prisonniers marocains – détail 2 (1875)

Benjamin-Constant

Prisonniers marocains – détail 3 (1875)

Benjamin-Constant

Prisonniers marocains – détail 4 (1875)

Benjamin-Constant

Le caïd marocain Tahamy (1883)
Benjamin-Constant
Un portrait, une image du Maghreb qui résume aussi toute l’Afrique.

Beauté orientale – détail (avant ou vers 1880)
Benjamin-Constant

Encore une fois pour la brillance des tons. 

La Sultane (2008)

Épreuve à développement chromogène marouflée sur aluminum 2/15

Lalla Essaydi (Marrakech 1956 – )

Pour finir sur une note plus contemporaine...

Harem n^o 2  (2009)
Épreuve à développement chromogène marouflée sur aluminum 4/15

Lalla Essaydi

En somme, Linda et moi avons passé un très bon moment à visiter cette exposition. Pour ma part, j’ai été agréablement surpris par le nombre et la qualité des œuvres, moi qui, Je l’avoue, m’attendais à rien d’extraordinaire, j’ai été conquis par cette explosion de couleurs chatoyantes qui m’ont fait voyager et rêver de l’Orient. Un seul bémol, Linda et moi sommes tous les deux d’accord sur le fait que parfois l’éclairage des œuvres n’était pas à la hauteur (trop de reflets, trop d’ombres projetées). Ceci rend la lecture, voire la contemplation, des œuvres agaçante.

Art québécois et canadien – Pavillon Claire et Marc Bourgie, MBAM

La visite de ces nouvelles salles était peut-être ce qui m’avait incité à provoquer ma visite à Montréal… et naturellement de passer du temps avec mon amie. Comme cela faisait aussi un assez bon moment qu’elle et moi étions allés revoir la collection permanente du MBAM, nous avons profité de l'occasion pour faire un tour rapide des différentes des pavillons du musée. Je vous le livre en vrac.

Arts décoratifs et design (Pavillon Lilliane et David M. Stewart)
Nous avons beaucoup aimé la muséographie et l'atmosphère de ces salles.
Dommage que ma photo n'en rend pas l'ampleur – Désolé ! 

Vieux palais à Venise (vers 1901-1902)
James Wilson Morrice (Montréal 1865 – † Tunis 1944)
Lui aussi a été conquis par la beauté de la Sérénissime.

Venise (vers 1901)

Maurice Cullen (Saint John's [T.-N.] 1866 – † Chambly [QC] 1934)

Les peintres canadiens se bousculaient à Venise en ce début de siècle.

Soirée sur le quai ou Port de Montréal (1868)

Henri Sandham (Montréal 1842 – † Londres 1910)

On est loin du Vieux-Port de Montréal actuel.

Esquisse pour la mort de Montcalm – détail (1902)

Marc-Aurèle de Foy Suzor-Côté (Arthabaska [QC] 1869 – † Daytona Beach [Floride] 1937)

Des coloris à fortes impressions.

Le Champ-de-Mars en hiver (1892)

William Brymner (Greenock [Écosse] 1855 – † Wallasey [Angleterre] 1925)

Souvenir d'une autre époque.

La bénédiction des érables (1920)

Marc-Aurèle de Foy Suzor-Côté

Ou quand la sève des arbres se transforme en un elixir d'or : le sirop d'érable.

Jeunes indiens chassant (après 1905)
Alfred Laliberté (Saint-Élisabehth-de-Warwick 1878 – † Montréal 1953)
On n'est pas sorti du bois.

Femmes de Caughnawaga (1924)
Marc-Aurèle de Foy Suzor-Côté
Assurément l’un de ses bronzes que je préfère.
Pour les intéressés, la photo sur le site du MBAM est plus intéressante.

Mlle de Verchères (vers 1907)
Louis-Philippe Hébert (Sainte-Sophie d'Halifax 1850 – † Westmount 1917)
Lors de notre visite, nous étions à quelques jours de la fête des Patriotes.

Rosaire (1935)
Prudence Heward (Montréal 1896 – † Los Angeles 1947)
Une époque révolue.

Sphère volante (1920)
Robert Tait McKenzie (Almonte [ON] 1867 – † Philadelphie 1938)
Elle est où la sphère ?... Elle s'est envolée ?

Le plongeur (1923)
Robert Tait McKenzie
Belle position de départ.

Le port de Montréal (1925)
Adrien Hébert (Paris 1890 – † Montréal 1967)
Une esthétique fonctionnaliste.

Port de Montréal (entre 1934 et 1944)
Marc-Aurèle Fortin (Saint-Rose 1888 – † Macamic 1970)
Je me lasse jamais des marines... et celle-ci est en feu !

Neige de novembre (1937 ou 1938)
Marc-Aurèle Fortin
Il faut vivre dans ce pays pour comprendre.

Neige de novembre – détail (1937 ou 1938)
Marc-Aurèle Fortin
Je le mentionnais au début de cette page,
et comme un rappel de la description de l'orientalisme,
Marc-Aurèle Fortin utilisait des couleurs aux tons plus chauds, privilégiant des teintes plus rouges, jaunes ou brunes... avait-il été influencé par ces derniers ?

Invitation au voyage (1989 et 1990)
Edmund Alleyn (Québec 1931 – † Montréal 2004)
Je me vois déjà navigant à Venise.

Au carnaval (1996)
Jime Dine (Cincinnati 1935 –     )
Inspiration pour un autre carnaval de Venise ?

Orientation (1988)
Joanne Tod (Montréal 1953 –     )
Nouvelle illustration des Trois Grâces.

Canal de Venise (?)
Aquarelle et gouache sur papier marouflé sur carton
William Callow (Greenwich 1812 –  † Great Missenden 1908)
En passant par la salle des estampes et dessins, une autre surprise vénitienne.

L'abbey gothique en construction à Fonthill, vue du sud, le soir (vers 1800)
Aquarelle sur traits à la mine de plomb
Joseph Mallord William Turner (Londres 1775 –  † Londres 1851)
Cette aquarelle me ramène à Londres et la superbe exposition Turner & the Sea. 

La salle des ventes chez Christie's (1801)
Aquarelle et/ou encre sur trait à la mine de plomb
Thomas Rowlandson (Londres 1756 – † Londres 1827)
Cette aquarelle me rappelle le film Mr Turner dans lequel on fait souvent référence au
Salon annuel de la Royal Academy.

Reconstitution des événements par Gilles Fluet (2014)
Lac Mégantic – Retour photographique sur une catastrophe ferroviaire - 1.

Débris, diptyque (2013)

Lac Mégantic – Retour photographique sur une catastrophe ferroviaire - 2.

Détail de l'intérieur d'une maison affectée par le désastre (2014)

Lac Mégantic – Retour photographique sur une catastrophe ferroviaire - 3.

Une rivière de pétrole (2013)

Lac Mégantic – Retour photographique sur une catastrophe ferroviaire - 4.

Petite caisse du Musi-Café (2014)

Lac Mégantic – Retour photographique sur une catastrophe ferroviaire - 5.

Sans commentaire (2014)

Lac Mégantic – Retour photographique sur une catastrophe ferroviaire - 6.

Femmes poursuivies par des satyres (1850)
Honoré Daumier (Marseille 1808 – † Valmondois 1879)
Tout un changement de registre.

Moutons au pâturage (après 1848)
Charles-Émile Jacque (Paris 1813 – † Paris 1894)
La campagne devrait toujours être bucolique et non bitumée.

Pivoines (1876)
Henri Fantin-Latour (Grenoble 1836 – † Buré 1904)
Les miennes ne sont pas encore sur le point de fleurir.

Plage de Varengeville (Normandie) (vers 1928)
André Derain (Chatou 1880 – † Garches 1954)
La mélancolie de la côte.

Portrait de Sir Hebert Read (1962)
Karel Appel (Amsterdam 1921 – † Zurich 2006)
J'adore, mais ne serait-ce pas plutôt Sir Hebert RED ?

Tête de Diego sur stèle I  (1958)
Bronze 5/6
Alberto Giocometti (Borgonovo 1901 – † Coire [Suisse] 1966)
Mon sculpteur italien préféré du XX^e s.

Portrait de la mère de l'artiste (1947)
Huile sur toile
Alberto Giocometti
Je pense qu'elle était parente de loin avec Sir Read.

Les dunes de Tourgeville (1880)
Eugène Boudin (Honfleur 1824 – † Deauville 1898)
Pour le calme pastoral.

Le cultivateur (1905)

Maurice de Vlaminck (Paris 1876 – † Rueil-la-Gadelière [France] 1958)

Bon c'est assez, je retourne dans ma campagne...

Pour vous lecteurs, qui avez apprécié le présent tour du MBAM, je vous invite aussi à aller voir mes deux autres pages qui, pour l'une, parle de l'exposition Splendore a Venezia (décembre 2013) et l’autre sur l’artiste verrier Dale Chihuly (octobre 2013).

Mais avant de quitter la « grande » ville, je me suis régalé d'une bonne pizza faite maison (la meilleure de la Rive-Sud) préparée par Linda et, en prime, j'ai eu aussi le plaisir de manger avec l'autre sœur (Joanne) ce qui n'a fait que doubler mon bonheur.

Merci à toi Linda pour la belle journée et merci également à toi Joanne pour ton agréable compagnie et pour ton amour extasié sur les patines que je te (vous) propose dans mon blogue. Et comme le dit Marlena de Blasi dans Mille jours à Venise : « La vie est une recherche de la beauté et que l’art aide à dissoudre la solitude. » C’est d’autant plus vrai, facile et gratifiant en bonne compagnie.